Que peuvent la science et les scientifiques face au cirque médiatique ? Si le débat sur les Organismes génétiquement modifiés (OGM) a été totalement phagocyté depuis une dizaine d’années par le marketing de la peur des écologistes, les instances scientifiques commencent à réagir sur les travaux idéologisés de militants-chercheurs.
L’académie des Sciences n’a pas apprécié les derniers travaux de Gilles-Eric Séralini sur la dangerosité des OGM (voir le compte rendu de l’excellent Sylvestre Huët de Libération). Pourtant peu enclin aux polémiques, l’institution a lancé une charge en règle contre la méthodologie, les résultats et la façon de présenter cette étude-choc dont l’ensemble des médias avaient fait leur choux-gras.
Deux responsabilités apparaissent clairement. D’une part celle de la revue qui, nous l’avons dit, n’aurait jamais dû accepter cet article, ce qui est grave car l’expertise de l’article par les revues tient lieu d’évaluation initiale par les pairs. La seconde responsabilité est celle de G.E. Séralini d’avoir orchestré à l’avance une surmédiatisation à partir de résultats contestables n’apportant aucun commencement de preuve, explique l’académie des Sciences.
Il faut dire que Gilles-Eric Séralini, militant (très) engagé dans la lutte contre les organismes génétiquement modifiés ne présentait pas toutes les garanties d’indépendance et de neutralité scientifique pour des travaux de recherche censés démontrer la multiplication des tumeurs sur des rats ayant été nourris aux OGM traités avec du désherbant Round Up.
Des indices révélateurs qu’avait choisi d’ignorer Le Nouvel Observateur, qui avait consacré une une retentissante aux travaux de M. Séralini sous le titre « Oui, les OGM sont des poisons ! ». L’ensemble des médias avaient emboîté le pas à l’hebdomadaire et, trois jours durant, le grand-public a été abreuvé d’informations catastrophistes sur les OGM et les dangers pour la santé qu’ils représenteraient.
Des résultats très vite contestés par la majorité des scientifiques du secteur (vendus au lobby OGM à en croire Gilles-Eric Séralini) qui mettaient pêle-mêle en cause la méthodologie, l’espèce de rats utilisée qui développerait spontanément des tumeurs, ainsi que les méthodes de publication de cette étude.
D’autres scientifiques avaient également dénoncé le fait que, contrairement aux usages scientifiques, Gilles-Eric Séralini ait privilégié le « buzz » d’une exclusivité au partage entre pairs de ses résultats visant à permettre la critique scientifique des éléments avancés. Les spécialistes auront du attendre la publication par le Nouvel Obs pour pouvoir jeter un oeil sur les travaux en question… et éventuellement les critiquer.
Et comme le train médiatique ne dure que deux à trois jours. Et que le temps scientifique est par essence beaucoup plus long, Gilles-Eric Séralini a eu son scoop, l’opinion publique est vaccinée contre les OGM… Et les réponses argumentées des scientifiques n’intéressent plus les journalistes… ou si peu.