Dans le sillage de l’attaque meurtrière de Rambouillet, fleurissent divers éléments de langage sur l’immigration et le terrorisme en France. Dernière illustration avec Philipe de Villiers qui s’est adonné le 27 avril à quelques infox sur le nombre de terroristes potentiels résidants dans le pays.
Alerte danger ! Sur le territoire français serait disséminé un grand nombre de jihadistes ou supposés tels, selon Philipe de Villiers. Ils seraient d’ailleurs selon l’ancien secrétaire d’État à la culture sous Jacques Chirac, pas moins de 400 000. À en croire l’ancien député donc, la France abriterait sur son sol, 400 000 personnes identifiées comme dangereuses ou suspectées de l’être par les renseignements et ayant les mêmes profils que le tueur de Rambouillet. Philipe de Villiers indique qu’il s’agit de données tirées du livre « Les militants du djihad : Portrait d’une génération », publié aux Éditions Fayard en janvier 2021, avec le chercheur Hakim El Karoui en co-auteur.
Chiffre exagéré, profil erroné
Mais la réalité est toute autre. En dehors, des amalgames entre immigration et terroriste déjà entretenues par nombre de figures politiques françaises ces derniers – Valérie Pécresse et Marine Le Pen notamment –, Philipe de Villiers a tout faux. Hakim El Karoui interrogé par l’AFP, tombe des nues sur les chiffres évoqués par l’ancien eurodéputé. Car selon le spécialiste de l’islam, il n’a jamais été question dans son ouvrage de 400 000 potentiels jihadistes, mais de 10 000. Une estimation faite en suivant 700 jihadistes français ayant gravité dans leur parcours autour de 300 à 400 000 personnes. Autrement dit, il n’y a pas 400 000 potentiels jihadistes en France, mais 10 000 tout au plus, comme l’indique le Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Dans cette base de données, figuraient en août dernier, 8 132 individus suivis par les services de renseignements, parce qu’identifiés comme terroristes ou susceptibles de l’être, selon le ministère de l’Intérieur.
Philipe de Villiers a également tort de vouloir lier le profil du terroriste de Rambouillet à ceux des personnes mentionnées dans l’ouvrage qui lui sert de référence. Car, ainsi que son auteur, l’homme identifié sous le nom de Jamel Gorchene par les services de sécurité était un Tunisien de 36 ans inconnu des services de renseignement. Ce n’est pas le même cas pour les 700 profils dressés dans « Les militants du djihad : Portrait d’une génération », qui parle de jeunes vivants dans les quartiers populaires.