Les outrances verbales de l’ancien chroniqueur pourraient lui coûter ses ambitions pour l’Élysée. Mais il n’en est rien pour l’instant, malgré la possibilité laissée aux juges par le législateur de prononcer des peines complémentaires d’inéligibilité pour les condamnés au racisme et à l’antisémitisme.
La question revient comme un serpent de mer à chaque scrutin présidentiel. Devrait-on laisser des personnes ouvertement racistes ou homophobes prétendre à diriger la France ? À l’évidence non. Mais la loi, seule habilitée à en juger, ne partage pas forcément un tel avis. De fait, Éric Zemmour ne court aucun risque de voir sa candidature retoquée malgré son statut de multicondamné à la haine raciale ou religieuse. Et ses dérives verbales peuvent continuer.
Pourtant, l’Assemblée nationale souhaitait mettre fin à une telle situation en adoptant en juillet 2017, sous l’impulsion de la majorité, un amendement destiné à rendre inéligible toute personne reconnue coupable de discrimination, de haine raciale ou de haine fondée sur la religion, le sexe et l’orientation sexuelle.
Mais la mesure censée rendre automatiques les peines complémentaires d’inéligibilité à l’endroit des condamnés à ces types de délits a été réprouvée par le Conseil constitutionnel deux mois plus tard au motif qu’elle serait attentatoire à la liberté d’expression, principe sacro-saint de la Constitution française. En clair, la haute juridiction considère l’antisémitisme, la discrimination basée sur le sexe, l’origine ethnique ou la race moins comme des crimes que comme des abus à la liberté d’expression.
Une résolution à venir
C’est ce que souhaite corriger le député Fabien Roussel en soumettant le 2 décembre prochain à ses collègues du parlement, une résolution visant à rendre automatiquement inéligible tout condamné à la haine raciale ou à l’antisémitisme par le biais d’une instruction judiciaire à l’initiative du gouvernement. Puisque selon le candidat du Parti communiste à la présidentielle, les juges prononcent rarement des peines assorties d’inéligibilité quand ils n’y sont pas obligés comme c’est le cas pour des crimes et délits relatifs à la corruption et à la fraude fiscale entre autres. C’est dire qu’à moins d’une décision de justice particulièrement inspirée de la part d’un juge dans un avenir proche, Éric Zemmour peut continuer de stigmatiser les Français selon leurs origines, la consonance de leurs prénoms ou leur religion sans crainte pour ses ambitions politiques.
Ce que Fabien Roussel a trouvé aberrant le 31 octobre dernier sur le plateau « Grand rendez-vous » d’Europe 1/Les Échos/Cnews. À l’en croire, le racisme et l’antisémitisme devraient valoir automatiquement l’inéligibilité des coupables au même titre que des infractions de corruption ou de blanchiment d’argent.