De nombreuses personnes ont donné de leur vie pour que le Mondial 2022 soit une réalité. Mais le nombre exact de ces victimes restera malheureusement inconnu. Explications.
D’aucuns les appellent les « petites mains » du Qatar, d’autres « les forçats » de la Coupe du monde. L’organisation de la compétition en cours depuis dimanche 20 novembre, dans le minuscule émirat, a nécessité une main-d’œuvre étrangère jugée bon marché, selon de multiples organisations de défense des droits humains.
Taillables et corvéables à merci à en croire les ONG, ces travailleurs provenant majoritairement de pays d’Asie, dont l’Inde, le Népal, le Pakistan, le Bangladesh et les Philippines, ont payé de leur vie cette recherche de la subsistance.
Le Qatar et la Fifa parlent de trois décès seulement en rapport avec l’organisation du Mondial. Quand d’autres évoquent plusieurs de milliers de morts, se fondant à tort sur un rapport d’Amnesty International. La réalité cependant demeure inconnue.
Manœuvres dissimulatrices
Et pour cause, les travailleurs migrants estimés à plus de deux millions – soit près de 75% de la population qatarie –, jouissent très rarement des droits inhérents au travail. Cette situation a régulièrement été critiquée depuis l’attribution de l’organisation de la compétition au Qatar en 2010. Les travailleurs meurent de fait dans l’anonymat, d’autant que les corps ne font presque jamais l’objet d’une autopsie.
Quand ce n’est pas le cas, la cause du décès est minorée. Il n’est pas rare de voir inscrit sur le certificat de décès « mort de cause naturelle », selon Nick McGeehan, auteur d’une étude sur les travailleurs migrants au Qatar, cité par The Athletic. Une manœuvre visant, à croire de nombreuses voix, à protéger l’employé de l’éventualité d’une indemnisation de la famille.
Cette manœuvre dissimulatrice est d’ailleurs à l’origine du chiffre « 3 » brandi par les autorités qataries comme nombre officiel de victimes sur les chantiers des stades de la Coupe du monde.
Méprise
Amnesty International annonçait l’année dernière avoir dénombré 6 500 morts d’employés étrangers au Qatar depuis 2010. Le chiffre obtenu des États d’origine de ces travailleurs revient depuis régulièrement dans les débats concernant le nombre de décès dus aux préparatifs de la Coupe du monde.
C’est une confusion puisque les données de l’ONG britanniques concentrent à la fois les morts intervenues sur les chantiers du Mondial et celles enregistrées d’autres secteurs du pays depuis l’attribution de la compétition au Qatar.
Mais la réalité tient probablement « de milliers de morts », selon Lola Schulmann, d’Amnesty International France interrogée par l’AFP.