Le responsable politique d’extrême droite accuse les Algériens de venir de se soigner gratuitement sur le sol français. Rien n’est pourtant plus loin de la réalité.
«Je mettrai fin au scandale des visas pour soin, qui fait que 40 % des Algériens qui demandent un visa sur le sol français sont des visas pour soin (sic), c’est-à-dire des visas pour venir se faire soigner dans notre pays aux frais de la princesse».
Intervenant le mardi 4 février 2025 sur le plateau d’Europe 1 – CNews, le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a déroulé une véritable diatribe contre l’Algérie, pays historiquement lié à l’Hexagone et dont les relations avec Paris n’ont jamais été un long fleuve tranquille.
Les deux capitales sont ainsi, de nouveau, en froid depuis plusieurs mois sur fond d’expulsion de leurs ressortissants respectifs, de piques verbales de part et d’autre. L’occasion rêvée pour le patron du RN de bander des muscles.
Des statistiques qui contredisent les allégations
Notamment à propos des privilèges dont les Algériens bénéficieraient à Paris dans le cadre de l’accès aux soins. Une situation qui ne devrait plus perdurer en cas de l’accession de son parti à la tête de l’État.
Seulement, rien ne permet de corroborer sa déclaration. Au contraire, les chiffres du ministère de l’Intérieur consultés par Checknews, la plateforme de vérification des faits du journal Libération, dressent un tableau radicalement différent de celui dépeint par le leader d’extrême droite.
En 2024, sur les 228 314 visas de court séjour accordés aux ressortissants algériens, seuls 489 concernaient des soins médicaux, soit une proportion de 0,21%. L’année précédente affichait des statistiques similaires avec 518 visas médicaux sur 185 892, représentant 0,28% du total.
D’après la Direction générale des étrangers en France (DGEF), la France comptait 649 991 Algériens disposant d’un titre ou d’un document provisoire de séjour au 31 décembre 2024. Soit environ 16% des étrangers résidant légalement sur le territoire.
Un système de prise en charge rigoureux et autofinancé
Bardella fait par ailleurs preuve d’une confusion révélatrice de sa non-maîtrise du sujet, évoquant « des Algériens qui demandent un visa sur le sol français », alors que la grande majorité des visas sont délivrés depuis l’étranger par les postes consulaires et diplomatiques.
Un processus soumis à des conditions strictes, comme le rappelle Checknews. Le demandeur doit ainsi fournir de nombreux justificatifs, dont l’accord écrit de l’établissement hospitalier avec dates et durée d’hospitalisation, certificat médical d’un praticien homologué en Algérie démontrant l’impossibilité d’une prise en charge locale, et engagement écrit à assumer les frais médicaux imprévus.
Cette garantie est renforcée par un protocole bilatéral entré en vigueur en 2019 après sa signature trois ans plus tôt. Il enjoint à la Caisse nationale algérienne des assurances sociales (CNAS) à rembourser intégralement les frais avancés par l’Assurance maladie française.
Les postes consulaires exercent également une vigilance particulière sur ces demandes, pouvant faire appel à un médecin-conseil pour évaluer l’urgence des soins et vérifier l’authenticité des justificatifs.